Génération Y : des Romantiques 2.0 ?

J’ai lu.
Ça : http://bigbrowser.blog.lemonde.fr/2014/12/27/la-jeunesse-actuelle-a-t-elle-envie-de-devenir-adulte/

Pis c’que j’ai lu m’a fait réfléchir. Pis ça m’a énervée un peu aussi. Alors j’ai continué de réfléchir.
J’ai voulu partager l’article sur Facebook et publier un p’tit truc. Mais P’tit Truc est devenu grand alors me revoilà. Ça faisait longtemps que j’avais rien publié dis-donc !!!

Qu’elle est loin l’époque où j’ai lu L’Éducation sentimentale de Flaubert ! Que j’ai détesté lire ce pavé ! Mais pourtant quand j’ai lu cet article, plein d’analyses de ce bouquin me sont revenues en mémoire. Comme il serait intéressant de le relire maintenant !…

Quel rapport entre ce bouquin et cet article du Monde ? Tout en fait. Devenir adulte dans une France (un monde ?) en perte de vitesse et d’idées.
De quoi ça cause au fait L’Éducation sentimentale ? Alors pour ça, vous êtes grands, je vais pas vous prendre par la main, ni par le clic de la souricette
(Avoue t’as cru que j’te donnais le lien… Eh, t’as-tu vraiment pensé que j’allais le faire ? Non, non, j’vous laisse chercher chacun de votre côté… Google est votre ami… et sur le sujet il se pourrait bien que Wiki soit votre nouvelle bestah. Avec ça, s’tu sais pas où aller chercher, j’peux plus rien pour toi… Just sayin’…)

Où je veux en venir ?
Ce sentiment d’être une génération sacrifiée, une génération laissée pour compte et pour qui les repères ne sont plus les mêmes, c’est pas nouveau. Les siècles ont passé, l’amnésie s’est installée, c’est tout.
Allez donc faire un tour du côté de Chateaubriand… René, tout ça, tout ça…

Lion dévorant un lapin, Eugène Delacroix

Lion dévorant un lapin , Eugène Delacroix (… ou la génération mangée toute crue…)

Les Romantiques ne sont pas que de doux rêveurs un peu illuminés, gentiment déjantés, geignards sur les bords. Ce sont des révoltés. Le Romantisme français apparait lors de la chute du Second Empire et rime avec perte des espoirs et ambitions de la jeunesse pour qui embrasser les grandes carrières de l’époque (entrer dans les Ordres ou dans l’Armée – mmmmh, miam ! Ça fait envie, ça vend du rêve !!!) n’est plus possible et n’a plus de sens.
Aujourd’hui, le contexte est différent, les histoires sont individuelles, les causes et les conséquences de cette perte de repères n’en sont pas les mêmes mais ce n’est pas la première fois de l’Histoire (et probablement pas la dernière !) que la jeunesse française est paumée et est perçue comme ayant du mal à devenir adulte.

L'emblème des Yers ?

L’emblème des Yers ?

Bref, tout ça pour dire que cet article, je le trouve à la fois intéressant et exaspérant au plus haut point parce que les vraies questions (bien vaguement abordées dans l’article, me semble-t-il), restent en suspens… En vrac… Ne devient-on pas adulte autrement, bordel ? N’y a-t-il qu’une seule façon d’être adulte, nom de Zeus ? Être adulte dans les années 2000-2010 peut-il (doit-il) recouvrir les mêmes notions qu’être adulte dans les années 1970-1980, tabarnak ? La génération X représente-t-elle une sorte d’Age d’Or du devenir adulte pour qu’on la sacralise comme ça et que les Yers soient considérés par beaucoup comme des adultes attardés, estie de calice ?

Pis vous, Yers ou pas, vous en pensez quoi de cet article du Monde ? J’aimerais bien savoir si je suis la seule que ça turlupine ces questions et considérations…

6 réponses à “Génération Y : des Romantiques 2.0 ?

  1. C’est vrai, je n’ai fait qu’évoquer la génération de nos parents, sans prendre la peine de parler des générations précédant celle de nos parents, mais il paraît évident déjà que nos grands-parents ont vécu des guerres, et en termes d’incertitude, je crois qu’ils gagnent la palme puisque les guerres du XXe siècles ont été les plus meurtrières de l’histoire.
    Ceci étant dit, il est possiblement vrai que notre génération n’a pas encore trouvé les moyens de s’épanouir en tant que génération, mais j’en doute énormément. En ce qui me concerne, à 25 ans, j’ai assisté à la plus grosse révolution contemporaine : l’avènement d’internet, de l’informatique domestique et de l’imprimante 3D. Et la maîtrise (toute relative, mais bon) de ces outil fait déjà de nous une génération spéciale, une génération de transition entre l’avant et l’après internet, smartphones, etc.
    Et puis, il ne faut pas oublier que la génération de nos parents s’est émancipée grâce à l’argent de la situation économique des 30 Glorieuses finissantes. La conjoncture économique et le sortir de la guerre ont rendu possible une émancipation religieuse et culturelle (la liberté d’expression qui a eu son acmé dans les années 80 avec des comiques comme Jean Yanne, Coluche, Desproges, Reiser). Il y avait plus de logements, plus de travail dans les grandes villes. Aussi, s’ils ont su s’émanciper c’est surtout grâce à la conjoncture économique favorable. Celle-là même que nous n’avons pas.
    Donc même s’il est vrai que le confort et la qualité de vie sont partout, la possibilité d’évolution qu’ont connu les générations précédentes nous est de moins en moins accessible. Le modèle économique se casse la gueule.
    Voilà mon crédo : oui nous n’avons jamais vécu aussi bien, mais nous n’avons jamais eu l’horizon aussi bouché. Et la conscience de cet horizon bouché, rendu possible par les études qui se sont généralisées, est peut-être le trait le plus significatif de notre génération. Mais c’est très contestable et ça réclamerait beaucoup d’études à la fois sociologiques et économiques pour établir une réflexion qui tienne la route. C’est le constat qui prime et le constat est sujet au passions…

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  2. (suite au commentaire de nagixstumpy ) Je ne peux m’empêcher d’ajouter un message, je vais essayer de faire court:
    Même en me relisant, je ne crois pas avoir écrit ni même voulu dire « qu’il y a plein de manières d’être adulte », mais oui, le cycle de la vie s’impose à nous et nous ne pouvons pas l’ignorer…. J’ai parlé de « l’âge adulte » pour démontrer que pour les jeunes cela fait appel à de nombreuses représentations. Ça va du cliché aux véritables valeurs pour ne pas dire des principes pour certains.
    Je me dis qu’il peut y avoir quelque chose de complexant à vouloir construire un édifice finissant – le modèle de société actuel -. Jean-François Ouellet parle vrai quand il dit « nous n’avons pas encore trouvé des idées et des moyens pour s’épanouir en tant que génération ». C’est bien ce sentiment qui habite les jeunes et d’autres moins jeunes (trentaine finissante).
    Alors oui, il y a une forme de romantisme renaissant, parce qu’il ne faudrait pas se laisser aller à croire que les jeunes années de nos aïeux n’étaient elles aussi pas faites de doutes ou qu’elles étaient nécessairement plus florissantes. Il n’y a peut-être en France que les années 60 à 80 qui aient été radieuses pour le plus grand nombre.
    Je crois que nous n’avons jamais eu plus de confort qu’aujourd’hui: nous sommes nombreux à avoir fait des études, à avoir habité notre propre logement et à avoir aimé son indépendance. Ça reflète un certain niveau de vie et ça peut paraitre désuet, mais dans les années 60, ce n’était pas le cas.

    Alors si nos ainés ont réussi à changer les modèles, nous devrions arriver à modeler les nôtres, sans pessimisme.

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  3. Je me permets de surenchérir, parce que les deux commentaires qui ont suivit le mien m’ont amené d’autres réflexions.

    Sab, tu dis qu’il y a plein de manières d’être adulte, non, je ne suis pas d’accord. Le seul fait qu’il y ait l’expression « âge adulte » prouve qu’il a fallu décrire cet âge. Du coup, s’il est vrai que la notion peut être traité très largement en sociologie, il est également vrai que l’on peut la définir par des critères généraux (qui ne désignent pas tout le monde, mais qui, globalement, permet d’identifié un large spectre social), du style : être adulte c’est être en âge de pouvoir élever des enfants, donc de pouvoir se gérer sois-même, etc. On est pas tous adulte au même âge. Le soucis soulevé par l’article était peut-être de dire que notre génération met du temps à devenir adulte, c’est à dire à se trouver, et à se gérer toute seule de manière durable. Et dans ce cas, l’article est pertinent.
    S’il y avait plusieurs manières d’être adulte, seul l’âge de 18 ans ferait de nous des adultes, or je connais plein d’adultes de 25 ans qui sont des adolescents qui savent pas quoi foutre de leur vie. Bref.

    Ensuite, oui, je pense que l’on doit évoluer par rapport à l’histoire (notre histoire personnelle, mais également politique, etc.) et du coup, chaque génération invente sa façon personnalisée d’être adulte, mais -du moins c’est mon sentiment- avec des invariantes ne seraient-ce que dues à la nécessité (jusqu’ici) de se reproduire…

    Jean-François, tu dis que l’objectif de la génération précédente était de conserver ses acquis pour survivre, tout comme il convient de considérer que notre objectif est équivalent. Je pense que c’est vrai, c’est le but de chaque génération, mais ce qui fait de notre génération une « génération sacrifiée », c’est le fait que conserver ses acquis et survivre est moins évident pour nous que pour nos parents, car tout est plus mouvant qu’avant. Et ce mouvement est assez nouveau, puisque induis par la mondialisation, qui n’a un réel impacte dans le monde occidental que depuis la deuxième moitié des années 80. Et la génération de nos parents c’était Mitterrand, l’espoir de la gauche, l’espoir politique. Est-ce qu’il existe aujourd’hui ? Je ne crois pas.

    C’est en ce sens que nous sommes une génération sacrifiée. Et ça ne me paraît pas aberrant de dire une telle chose. Nous sommes moins assuré que nos parents pour nous en sortir dans la vie, car la situation économique et politique n’est pas optimale.

    En revanche, et je finirais là-dessus parce que je commence à être chiant, je suis d’accord avec toi pour dire que cette instabilité et cette période de transition, à défaut d’être un frein, sont des moteurs pour envisager d’autres modes de vie, pour pallier aux problèmes. Mais attention, je ne sais pas dans quel espace social tu évolues, mais je connais plein de jeunes de mon âge (j’ai 25ans) pour qui la vie n’est pas de chercher des alternatives au mode de vie de nos parents mais bel et bien de continuer envers et contre toute logique dans le même entêtement de consommation.

    Bref, ce genre d’article pointe un véritable problème, et soulève des questions qui sont tout à fait pertinentes (la preuve ici), ce qui prouve que notre génération peut être considérée (par rapport à celle de nos parents bien évidemment) comme une génération « sacrifiée ». Nous voyons les limites d’un système en place depuis la seconde moitié du XIXe siècle. Ca n’est pas rien.

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  4. Cet article traite des conflits de valeurs intergénérationnelles. Je ne vais pas répondre aux questions, mais plutôt resituer le débat. Peut-être qu’il y aura de nouvelles choses à ajouter après.

    Les valeurs individuelles ne signifient pas une augmentation de l’égoïsme chez les personnes, mais plutôt une diversification des représentations du monde et des chemins à poursuivre. Je prend l’exemple dans ma famille. Mes parents ont une idéologie conservatrice et familiale. Elles valorisent le travail, la proximité et le respect. Ayant grandi dans le monde universitaire, j’ai réalisé plusieurs nouvelles valeurs, l’ouverture au monde, la protection de l’environnement, la connaissance, etc. Ainsi, il y a comme une confrontation entre les valeurs traditionnelles et celles progressistes.

    Est-ce qu’on est une génération sacrifiée? Je ne le penses pas! L’idéologie de la génération précédente était de protéger leurs proches et de conserver les acquis matériels pour survivre. Nous sommes encore en survie… C’est une chose qui a été présente depuis plusieurs décennies. On pense peut-être à une majorité des baby-boomers qui tentent de s’approprier de la scène politique pour conserver leurs acquis au dépens de la prochaine génération. Cette idéologie peut être fondée sur les résultats de la politique au Québec et en France. Toutefois, je vois plusieurs vieilles personnes ayant des idées progressistes.

    Ce qui fait éclat est que nous n’avons pas encore trouvé des idées et des moyens pour s’épanouir en tant que génération. Les jeunes tentent de se représenter dans l’avenir sous plusieurs symboles: l’agriculture urbaine, la déplétion des ressources (vivre sans pétrole), la réussite d’un emploi, avoir une famille, etc. Chaque personne tente de trouver une manière de s’épanouir avec leurs acquis antérieurs (famille, amis, argent) et leur cheminement (parcours scolaires ou travail). C’est dans cet état d’aveuglement qu’on demeure pris entre la période de l’adolescence et de l’adulte.

    En espérant ne pas avoir trop dévier le débat, je pense seulement que nous ne sommes pas les seuls à vivre comme les Romantiques et que toute génération a eu un moment de transition pour s’identifier. C’est juste que les mouvements sociaux diffèrent et que nous tentons de trouver un chemin dans nos représentations antérieurs et les défis à venir.

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  5. Petite réponse d’une X & Y 😉

    1- Ne devient-on pas adulte autrement, bordel ?
    Et bien si, justement. C’est un savant mélange entre les représentations de tes parents (ce qu’ils sont, ce qu’ils auraient aimés être, ce qu’ils ne voudraient pas que tu sois et TOI !). ça ressemble a une crise identitaire comme celle que certains font sur le tard… Bien après la crise d’adolescence.

    2- N’y a-t-il qu’une seule façon d’être adulte, nom de Zeus ? Être adulte dans les années 2000-2010 peut-il (doit-il) recouvrir les mêmes notions qu’être adulte dans les années 1970-1980, tabarnak ?
    Tu parles d’oubli un peu plus haut ; tu ne voudrais pas que les jeunes se positionnent autrement que par rapport à leur histoire et à celle de leurs aïeux, même en la contrariant, la contredisant et surtout en évoluant par rapport à l’existant.

    3- La génération X représente-t-elle une sorte d’Age d’Or du devenir adulte pour qu’on la sacralise comme ça et que les Yers soient considérés par beaucoup comme des adultes attardés […] ?
    Il faudrait bien considérer ce qu’est « l’âge adulte » avant tout et ce qu’il représente pour les jeunes. Peut-être que c’est « le passage à l’âge adulte » qui manque avant tout aux jeunes. Il y aurait même surtout un refus de la part de certains, qui prend ses racines très tôt dans l’enfance. Pour exemple, ma nièce (8 ans) disait pas plus tard qu’après avoir déballé ses cadeaux de Noël:
    – » Moi je ne voudrais plus grandir. C’est nul »
    Réponse de ses oncles et tantes:
    L’une : -« tu dis ça parce que sais combien c’est l’aventure de grandir et que tu ne sais pas comment ce sera »
    La petite : -« Pfffff (haussement d’épaules) »
    L’autre : -« Non, je crois qu’elle a tout compris »

    Ses mots ont trouvés une résonance en moi, parce que je me les étais dit au même âge, parce que mes proches ont toujours pris ça pour sorte de nostalgie, ou bien de la mélancolie à l’adolescence et enfin le refus de s’engager à l’âge adulte.
    Je crois qu’en définitive, l’absence de rite de passage à l’âge adulte peut laisser dans le vague bien longtemps.
    On vit une époque où on a l’impression que tous les choix sont possibles. A l’ère de la Liberté, le cycle de la vie s’impose à nous comme une surprise. Et tout à coup, tiens donc : nous sommes adultes !

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  6. J’ai bien lu l’article dont tu parles. J’ai même hésité à répondre dans le fil de commentaires. Et puis non. Mais je pense que tu n’as pas tort, le sentiment d’être une génération sacrifiée n’est pas nouveau. Il se trouve qu’on tombe pile dans une dépression et l’apparente fin d’un système idéologique et économique. La période de transition n’est même pas entamée. C’est vrai que notre génération a tendance à prendre les choses un peu par dessus la jambe, parce qu’autour de nous rien n’est stable, contrairement au monde de nos parents. Et si ce sentiment n’est pas nouveau, l’instabilité constante, le flux d’informations, internet, etc, sont nouveaux. Dans ce monde qui change, les repères de stabilité (travail, mariage, propriété) sont biaisés. Ce qui faisait avant l’entrée dans l’âge adulte n’existe plus en tant que tel. On est de la génération CDD, de l’emploi délocalisé, des parents mariés puis divorcés, et de la propriété de plus en plus chère. Donc, je te suis sur un point : oui, le sentiment d’être une génération sacrifiée n’est pas nouveau c’est vrai. Mais il y a des innovations qui rajoutent à ce sentiment. Et il est fort probable que nous soyons, adulescent du monde occidental, une génération de rupture, justement parce que nous sommes une génération sacrifiée, comme les romantiques qui ont installés la République de manière définitive après l’Empire. Mais, pour finir, d’un point de vue objectif, ne pas avoir ces critères objectifs d' »adultitude » me fait me sentir adulescent plus qu’adulte. La situation provoquée par des études longues provoque ce sentiment, la plus forte dépendance aux parents due à la situation économique aussi. Pour résumer, l’article ne pose en effet pas les bonnes questions, mais touche un point important…

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